Certains noms échappent systématiquement aux listes classiques de courses et de saisonnalité. Les appellations commençant par la lettre I forment un ensemble restreint, souvent négligé dans les guides alimentaires courants.En production agricole, ces variétés demeurent rares sur les étals français, malgré une présence régulière dans d’autres régions du monde. Quelques spécimens parviennent pourtant à se distinguer, marquant une offre discrète mais persistante, à la fois en frais et en transformé.
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Pourquoi si peu de fruits et légumes commencent par la lettre i ?
Le contraste est frappant : quelques minutes à feuilleter les répertoires botaniques suffisent à voir la liste s’éclaircir. En français, seul l’igname s’impose côté légumes, tandis que tout juste cinq fruits principaux s’aventurent sous cette initiale : icaque, inga, imbu, irvingia, ilama. Autrement dit, les marchés français font rarement la part belle à un fruit ou légume en I, et il faut parfois un concours de circonstances pour en croiser un.
La rareté dépasse une question de vocabulaire. La majorité de ces espèces viennent des tropiques, donc absentes de la plupart des fermes françaises. L’igname, par exemple, occupe une place capitale dans les cuisines d’Afrique de l’Ouest, d’Asie ou des Antilles, mais peine à s’installer en métropole. Quant aux fruits en I, l’icaque s’épanouit sous le soleil antillais ; inga, imbu, irvingia ou ilama restent largement à l’écart des habitudes européennes.
Pour celles et ceux qui jouent au Scrabble ou au petit bac, ces noms relèvent presque du sésame : l’icaque devient une trouvaille, une façon de faire la différence. Finalement, cette sous-représentation résulte d’un enchaînement de causes : origines exotiques, débouchés alimentaires limités, faible intégration dans le répertoire culinaire local.
Fruits en i : des saveurs méconnues à découvrir selon les saisons
Parmi les curieux du goût, quelques-uns croisent parfois ces fruits en i sur les marchés d’autres continents. Leur profil gustatif s’éloigne franchement des références occidentales, révélant de nouvelles palettes. Prenons l’icaque (prune de coton ou icaco), grand classique des Caraïbes et de l’Afrique tropicale : sa chair blanche, douce et légèrement acidulée, fait merveille en confiture, en dessert ou dans des plats sucrés-salés typiques de la Martinique ou de la Guadeloupe.
L’inga, surnommé pois sucré, offre de longues gousses vertes remplies d’une pulpe blanche, sucrée, qui se picore à la saison des pluies comme une friandise naturelle. L’imbu, discret fruit d’Asie du Sud-Est, tire son épingle du jeu avec sa chair juteuse et acidulée, parfois relevée d’un soupçon de sel ou de piment sur les étals thaïlandais.
Direction l’Afrique de l’Ouest avec l’irvingia : la pulpe va du sucré à l’amer, mais ce sont surtout les graines qui sont recherchées pour épaissir soupes et sauces ou donner une huile végétale précieuse. L’ilama, fruit d’Amérique centrale, se rapproche de l’anone, à déguster à la cuillère pour sa texture crémeuse.
Voici comment ces fruits sont généralement utilisés selon les coutumes locales :
- Icaque : confiture, dessert, accompagnement.
- Inga : dégustation de la pulpe fraîche, sucrerie naturelle.
- Imbu : fruit frais nature, jus acidulé.
- Irvingia : pulpe à croquer, graines à cuisiner ou pour l’huile.
- Ilama : fruit à la cuillère, dessert saisonnier.
Légumes en i : focus sur l’igname et ses usages en cuisine
Face à la discrétion des variétés, seul l’igname se démarque vraiment dans la catégorie légume. Ce tubercule volumineux, à la peau coriace, blanche, jaune voire brune, constitue un aliment de base en Afrique, en Asie et dans les Caraïbes. Sa richesse en amidon (près de 25 %) le place en concurrence directe avec la pomme de terre, mais sans contenir autant de matières grasses, avec des atouts non négligeables côté vitamines B1, B6 et potassium.
En Afrique de l’Ouest, il nourrit littéralement des millions de familles. Certaines espèces d’igname contiennent de la diosgénine, une molécule étudiée pour son pouvoir antioxydant. Sa résistance à l’humidité rend la conservation aisée, ce qui pèse lourd dans l’équilibre alimentaire de plusieurs régions.
En cuisine, l’igname se décline en purée parfumée à l’huile de palme ivoirienne, en morceaux frits pour des plats croustillants, en gratin avec lait de coco ou épices, ou braisé et fermenté pour les bières traditionnelles guyanaises. Aux Antilles, il s’invite dans le colombo et les soupes épaisses. Une petite précaution : mieux vaut porter des gants pour l’éplucher, car sa peau peut irriter.
Quelques exemples d’utilisations régionales de l’igname :
- Bouilli : base du foutou ivoirien, ou du yam pounded nigérian
- Frit : version croustillante en accompagnement
- Gratiné : revisité au lait de coco, version épicée
- Purée : alternative fondante à la pomme de terre
Avec plus de 70 millions de tonnes produites dans le monde, surtout grâce à l’Afrique, l’igname ne souffre d’aucune concurrence dans la famille des légumes en “i”. Sa présence se répand d’ailleurs petit à petit au-delà de ses frontières traditionnelles.
Tenter l’aventure avec ces fruits et légumes qui commencent par i apporte un souffle nouveau en cuisine. L’icaque (la prune de coton créole), donne une confiture épaisse ou une note acidulée dans une salade de fruits. Sa chair sucrée, vitaminée, fonctionne aussi en accompagnement, par exemple avec du poisson ou de la volaille pour un contraste inattendu.
L’inga, pois sucré, se déguste directement depuis la gousse, la pulpe fondant presque sur la langue. Cette habitude, banale sous les tropiques, fait toujours son effet auprès des curieux. L’imbu, pour sa part, séduit les palais avides de fraîcheur : à croquer nature, ou à transformer en jus avec une pointe de sel, le fruit rappelle la street food d’Asie du Sud-Est.
Pour vous aider à visualiser les possibilités en cuisine, ce tableau synthétise les principaux usages de ces variétés :
Fruit / Légume | Utilisation |
---|---|
Icaque | Confiture, dessert, accompagnement sucré-salé |
Inga | Consommation fraîche, pulpe à même la gousse |
Imbu | Jus, dégustation nature, avec sel ou piment |
Irvingia | Pulpe à savourer, graines pour épaissir les soupes |
Ilama | Dégusté à la cuillère, en jus, dessert onctueux |
Igname | Bouilli, frit, purée, gratiné, braisé, ou en bière locale |
L’irvingia, mangue sauvage, offre une pulpe orangée mangée telle quelle, ses graines épaississant sauces et soupes, ou donnant une huile végétale appréciée. L’ilama, proche cousin mexicain de l’anone, se savoure mûr, à la cuillère ou en simple dessert. Et l’igname ? Bouilli, frit ou en gratin, il enrichit toutes les saisons d’une touche inattendue et rassurante.
Sous la lettre “i”, la variété manque, mais ceux qui osent saisir ce petit alphabet culinaire découvrent de nouveaux horizons gustatifs. Parfois, il suffit de changer une seule lettre pour ouvrir la porte à l’ailleurs, c’est toute la saveur de la curiosité.